Sur les traces de l’histoire d’Erlangen… (Mittwoch, 15.10.2014)
Ce matin, le ciel nous en veut apparemment un peu : la journée démarre sous un orage avec des trombes d’eau que nous essayons d’esquiver tant bien que mal sous des abribus, en attendant le départ des visites. Dans le groupe récupéré au lycée Ohm, c’est le temps de récupérer de nos émotions après la rencontre fortuite, dans le bus, de Monsieur le Maire d’Erlangen (qui nous a même tout de suite reconnus) – eh oui, c’est une ville à taille humaine, et le maire se déplace en bus (ou en vélo, comme il nous dit : mais comme ce matin, les averses étaient imminentes, prendre le bus était plus prudent). En plus, il connaît visiblement bien ses administrés et échange avec quelques-uns pendant son trajet !
Notre groupe débute la visite au Stadtmuseum (musée municipal) qui retrace l’histoire de la ville et plus précisément celle qui relie Erlangen à la France : en effet, c’est à partir de l’arrivée des Huguenots (Hugenotten) fuyant les persécutions en France sous Louis XIV qu’Erlangen commence à véritablement se développer. Afin de faire venir ces Français détenteurs de savoir-faire très prometteurs en vue de lancer une économie productrice d’impôts, le Markgraf (margrave) Christian Ernst von Brandenburg-Bayern offre de leur construire une nouvelle ville, la Neustadt, aux portes de la Altstadt (vieille ville) d’Erlangen qui à l’époque souffrait encore des séquelles laissées par la guerre de Trente Ans (1618-1648) : 5% seulement de la population d’avant la guerre restait sur place…
Notre TP découle de ce point de départ : nous nous muons en architectes en chef et proposons au margrave et à sa charmante épouse des plans de construction, avec force arguments. Vous pouvez voir sur les images le sérieux avec lequel nous avons mené nos conciliabules, en vue d’impressionner ces majestés (ici présents avec leurs doublures respectives).
Mais passons du côté des Huguenots une fois installés ici : bien qu’ils aient tous trouvé du travail bien utile et apprécié par la noblesse locale, quelle disparité criante entre leurs conditions de vie respectives : côté lumière par exemple les Handschuhmacher, les gantiers. Ils effectuaient non seulement un travail pas démesurément physique mais aussi très rémunérateur : une paire de gants se fabriquait assez rapidement et surtout, comme elle n’était pas lavable (étant faite en cuir de veau très fin et bien blanc) et qu’un noble devait être toujours impeccable et surtout présenter les mains bien blanches, c’était un produit à durée de vie très courte, donc un débouché assuré (un noble pouvait en consommer 3-4 paires par jour…).
Côté ombre, au sens propre comme au sens figuré, les Strumpfmacher (fabricants de chaussettes) : en travaillant sans relâche, ils arrivaient péniblement à une paire par jour – et même les machines très sophistiquées dont ils avaient importé les plans mais dont la construction représentait un investissement énorme, permettaient seulement de produire environ 3 paires. En plus, ils travaillaient dans des conditions très malsaines, intérieur de la maison sombre (d’où problèmes des yeux) et mal aéré malgré présence de particules de la laine qu’il fallait d’abord filer (d’où problèmes de poumons), - ajoutez à ceci les conséquences diverses de malnutrition car pas assez d’argent de gagné, et vous comprendrez pourquoi leur espérance de vie ne dépassait pas souvent les 25 / 30 ans…
Nous sortons un peu déprimés et sommes ravis de voir qu’entretemps, le soleil est revenu, ce qui rend bien plus agréable la visite d’une cour intérieure où nous pouvons voir comment étaient agencés, à l’époque, les maisons d’ouvrier, avec l’atelier au rez-de-chaussée et la partie habitation au premier étage : ils avaient même la possibilité de travailler dans la cour intérieure, par beau temps, profitant de la lumière du jour – tous sauf les Strumpfmacher bien sûr, dont les machines étaient trop lourdes pour les bouger…
Nous continuons notre chemin à travers les petites rues jusqu’au Schlossgarten (jardin du château), où nous admirons l’orangerie d’un côté et au centre, la belle fontaine que les huguenots avaient offerte à leur margrave : vous observerez qu’elle est construite en forme de pyramide, avec à la tête, notre cher Christian Ernst, puis en bas, reconnaissables à leurs costumes avec tricornes pour les messieurs, des représentants des huguenots. Magnifique, surtout au soleil ! D’ailleurs, cette fontaine se trouve sur un axe de symétrie (cette dernière étant si chère au baroque comme nous l’expliquait le guide) allant d’une statue de Christian Ernst à cheval, au fond du parc jusqu’au centre du château, en passant par ladite fontaine.
Nous contournons le château pour nous rendre devant sa façade côté place du marché, où se trouve – toujours dans le même axe – une statue de Friedrich III., le successeur du margrave qui pour sa part, a fondé l’université d’Erlangen, en 1742.
Ouf ! Riches de tous ces éléments insoupçonnés sur la ville qui nous accueille, nous retournons vers nos lycées pour rejoindre nos corres, en passant par la Hugenottenplatz. Voici la vue sur la Hugenottenkirche, le temple que bien sûr le margrave Christian Ernst avait fait construire également à ses huguenots : c’est tout de même pour exercer leur religion librement qu’ils étaient venus aussi! Malheureusement, le temple ne peut être visité aujourd’hui, pour raisons techniques – mais bon, nous nous en remettrons…
A demain pour de nouvelles aventures !